Cachez cette justice….

Communiqué de presse – 21 septembre 2015
Action collective

Par un arrêt du 9 septembre 2015 la Cour de cassation a validé l’installation d’une salle d’audience attenante au centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot, à proximité immédiate de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, où sont exclusivement jugées les demandes du préfet de prolonger la rétention des étranger·e·s en attente d’expulsion.

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Pour la Haute juridiction siégeant sereinement au cœur de la Cité, les étranger·e·s ne méritent donc pas mieux qu’une introuvable annexe du tribunal de Meaux, le tarmac, le hurlement des réacteurs et les odeurs de kérosène.

Qu’importe que cette justice des expédients se soustraie au regard des amis, de la famille, du public, des médias en se rendant inaccessible : mieux vaut ne pas trop donner à voir le défilé navrant de ceux dont l’enfermement prélude à l’arrachement à leur vie d’ici.

Pierre angulaire du procès équitable, la publicité de l’audience, réelle et pas seulement théorique, cède ainsi face à l’indigne calcul d’économies qui conduit ces femmes et ces hommes, éphémères et fragiles sujets de droit, à comparaître loin de tous mais à quelques minutes de la passerelle de l’avion qui leur est promis.

L’impartialité apparente de la juridiction passe elle aussi par pertes et profits, dans ce dispositif judiciaire, où la main du préfet et celle de son administration sont partout visibles.

Quant à la confiance dans la justice que procure la comparution devant une juridiction parée de tous ses attributs, elle devra se satisfaire du huis clos où se croisent des escortes policières et les quelques avocats qui veulent bien – ou peuvent encore – se transporter aux côtés de ces justiciables d’un jour.

Une justice rendue à l’écart pour des étranger·e·s mis à l’écart : voilà qui confirme les craintes qu’exprimait le commissaire aux droits de l’homme du conseil de l’Europe lorsqu’il écrivait à la ministre de la justice, en 2013 : « ces audiences tenues dans des conditions exorbitantes du droit commun risquent d’accréditer l’idée que les étrangers ne sont pas des justiciables ordinaires ».

Sont-ils seulement regardés, aujourd’hui, comme des femmes et des hommes ordinaires ?

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Signataires :
Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE)
Groupe d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s (Gisti)
La Cimade
Ligue des droits de l’Homme (LDH)
Syndicat des avocats de France (SAF)
Syndicat de la magistrature

Contacts presse :
La Cimade – Rafael Flichman : 01 44 18 72 62 – 06 42 15 77 14 – rafael.flichman@lacimade.org
Syndicat de la magistrature – Patrick Henriot : 06 98 87 74 78

Communiqué à propos de l’audience du 3 mars

Cette audience est importante car le juge doit trancher un gros problème juridique.

En effet, nous sommes dans un État de Droit que le juge est censé dire; le Droit de propriété dont se revendique Angers Loire Métropoloe se trouve dans le cas d’espèce en contradiction de par la nature juridique des occupants avec une autre codification : le Droit au logement à valeur constitutionnelle qui ressort du Droit commun (Code de l’Action sociale et des familles) ne s’applique plus de par la nature juridique des occupants, demandeurs d’asile.

En effet, les demandeurs d’asile relèvent de la compétence du droit international (Convention de Genève) et du Droit communautaire (« paquet asile », émanation conjointe du parlement européen et du Conseil de l’Europe).

Sur la question du logement il n’y a pas DROIT mais OBLIGATION de l’État membre de les loger de façon durable et stable à moins de violer les traités (traité de Lisbonne) et les règlements et directives applicables en la matière.

Depuis des années nous dénonçons, à travers ces réquisitions entre autres, ces violations et dysfonctionnements. Or, un rapport du commissaire européen aux droits de l’Homme vient d’être transmis le 17 février par le Conseil de l’Europe, organe exécutif de l’UE et il dénonce les conditions d’accueil faites aux demandeurs d’asile notamment sur la question de leur logement; selon le rapport (en pièce jointe), les dysfonctionnements du logement des demandeurs d’asile ne sont pas conjoncturels mais structurels ! il était grand temps qu’une instance officielle s’en rende compte… Ce rapport vient compléter la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union, notamment l’arrêt du 27 février 2014.

Cette audience risque d’être particulièrement intéressante car le juge devra prendre en compte l’obligation internationale de l’Etat de loger durablement les demandeurs d’asile sans pour autant négliger le droit de l’agglo sur la propriété.

Les services de l’État et les pouvoirs locaux savent collaborer efficacement quand il faut expulser les squats. Ce ne serait pas plus profitable à la collectivité s’il coopéraient pour mettre en œuvre ces « solutions alternatives » préconisées par la circulaire Valls d’août 2012 et qui ont été enterrées sitôt parues ?